Le Bouwmeester flamand Leo Van Broeck, qui habite à Bruxelles, a un seul conseil à donner à celui qui veut vraiment construire durablement.
Pour le Bouwmeester, la construction durable va de pair avec un seul facteur déterminant : l'utilisation du sol. “Actuellement, nous exploitons 70 % des zones fertiles de la planète et c'est bien plus que le maximum acceptable. Nous devons par conséquent dès demain cesser d'occuper l'espace disponible."
"A long terme, nous devons réduire l'occupation du sol à un maximum de 50 à 60 %. Le climat aussi reste important : même si nous préservons un écosystème suffisant, nous risquons tôt ou tard de nous consumer dans la chaleur ou de nous noyer sous le niveau de la mer. Et nous devons faire en sorte que cela n'arrive pas.”
Une réduction des émissions de CO2 ne suffit pas
Van Broeck ne soutient donc pas la politique du laissez-faire au niveau énergétique. “Mais la réduction des émissions de CO2 à elle seule ne suffit pas. Avec des bâtiments écologiques, on peut détruire la planète entière. On parvient vraisemblablement à maintenir le climat en équilibre mais quelle est l'utilité si en fin de compte, toutes les espèces disparaissent par manque d'habitat ?”
Il émet par conséquent des réserves à l'égard du niveau E comme instrument politique. “Deux paramètres suffisent : l'utilisation du sol et la densité. Celui qui veut construire durablement devrait commencer par trouver un endroit où il vit en auto-suffisance.”
Ne pas prétendre à l'intégralité de votre terrain
Selon Van Broeck, une deuxième piste consiste à couper dans votre surface bâtie. Il donne le bon exemple. Pour les promoteurs immobiliers Matexi, Novus et Bostoen, son bureau d'architecture a imaginé un mix de 180 à 190 habitations et appartements dans le centre d'Oostkamp. Particularité : le domaine de 6 hectares n'est bâti que sur un tiers de sa surface. Le reste est réaffecté comme zone naturelle, avec des sentiers qui traversent la végétation. Les premiers occupants profiteront, dès 2019, d'une nature intacte et du chant des oiseaux rares.
Leo Van Broeck : “Ils ne doivent plus se rendre dans un des Center Parcs pour voir un héron cendré. Cela démontre qu'en tant que maître d'ouvrage, il ne faut pas attendre le Plan flamand d'aménagement du territoire (NDLR : la base du ‘stop au béton’) pour créer une réserve naturelle près de chez vous. Commencez par ne pas revendiquer un tiers de votre terrain à bâtir. Cela vaut autant pour les maîtres d'ouvrage que pour les promoteurs immobiliers.”
Faire de la place
Le Bouwmeester propose même un concept alternatif au maudit ‘stop au béton’ : “Parlons plutôt de ‘faire de la place’. Même un petit enfant voit le problème. Alors que nous nous fourvoyons dans la complexité. Notre regard est rivé sur la laine de roche et les boilers solaires. Mais il s'agit d'élargir notre vision. Nous devons retourner à l'essentiel !”
Parcs naturels et baromètres de voisinage
Heureusement, quelques initiatives prometteuses voient le jour. L'administration communale de Gand a ainsi décidé de fermer l'accès à certaines zones de parcs, pour permettre à la nature de reprendre ses droits. Leo Van Broeck : “Les arbres tombés restent au sol. Cela favorise la biodiversité. Et les visiteurs profitent encore davantage de la beauté du paysage.”
L'entreprise de construction Matexi est quant à elle convaincue de l'importance d'une situation durable. Le plus grand promoteur immobilier de Belgique accorde beaucoup d'attention à la situation de ses habitations et à la proximité des infrastructures dans les descriptions de projets sur son site web. “Nous avons développé un baromètre de voisinage qui nous permet d'évaluer la qualité d'un emplacement en fonction de la proximité par rapport aux transports en commun, écoles, lieux de travail, magasins …”, explique Tom Van Becelaere, businessunit manager chez Matexi.