La biomasse a-t-elle sa place dans le mix énergétique de demain ?

Va-t-on vers une interdiction des poêles au bois ? Une nouvelle construction peut-elle encore être chauffée aux pelles ? Et les émissions de particules fines ? Autant de questions que les bâtisseurs et rénovateurs doivent se poser. Et auxquelles la réponse est bien plus nuancée qu’un simple oui ou non. C’est la raison pour laquelle Livios a convoqué huit experts pour prendre part au débat sur la biomasse. Premier round : demain nous chaufferons-nous encore au bois et aux pelles ? Où en est-on au niveau politique ?

  • débat sur la biomasse
    © Marc Sourbron - Photo Livios

Les conseils de Livios, en bref

Vous n’avez pas le temps de lire cet article en entier ? Voici ce que vous devez retenir !

1. Un cadre légal clair s’impose : aujourd’hui, il manque une vision coordonnée de la biomasse.

2. La biomasse a une place dans le mix énergétique de demain : aux côtés des pompes à chaleur et des réseaux de chaleur.

3. La combustion du bois est possible avec des appareils efficaces, les bons filtres et combustible, des installateurs qualifiés et des utilisateurs bien informés.

4. Les poêles multi-combustibles et feux ouverts doivent disparaître. Leur rendement est mauvais. Mais surtout, la combustion du bois est nocive pour la santé.

5. Notre parc de poêles est obsolète. Les gens continuent d’utiliser d’anciens appareils. Une intervention financière pour le remplacement d’anciens poêles est indispensable.

Récemment, le professeur Michel De Paepe a examiné nos besoins en chaleur dans un article d'opinion sur Livios et le rôle joué par les poêles et foyers. Sa vision a suscité pas mal de réactions. Car un foyer au bois et/ou aux pelles est aujourd’hui l’une des options pour satisfaire à la part obligatoire d’énergie renouvelable. Est-ce par conséquent un choix logique ? “Quand même”, estime Christophe Fonteyne, gérant de Polvo. “C’est très simple au fond. Actuellement, vous avez plusieurs sources d’énergie. L’énergie nucléaire et les combustibles fossiles, comme le mazout et le gaz naturel, sont voués à disparaître. La question n’est donc pas de savoir si le bois demeure une source de chauffage, mais plutôt quel volume il va représenter dans le mix énergétique total.”

Première étape : limiter les besoins en chaleur

“Après le mazout, le gaz aussi va disparaître”, confirme Michel De Paepe. “Celui qui investit aujourd’hui dans le mauvais combustible, en paie le prix pendant vingt ans, lorsqu’il vend sa maison. Notre conseil : investissez votre argent dans ce qui ne demande pas de chaleur, comme une maison bien isolée. Vous limitez ainsi les besoins de chauffage. Les pouvoirs publics doivent y veiller et combler les vides dans la loi qui vous autorisent à faire de mauvais investissements. Ce n’est qu’après qu’intervient la discussion sur la façon dont nous nous chaufferons demain.”

Selon le professeur De Paepe, cet avenir est majoritairement à l’électricité. “L’électricité et les réseaux de chaleur sont les plus efficaces pour le transport d’énergie. Le reste vient après. Veillez donc à d’abord bien isoler et à équiper votre habitation d’un système de chauffage à basse température. Aujourd’hui, il peut encore s’agir d'une chaudière au gaz naturel, mais dans dix ans, vous devrez passer à une pompe à chaleur.”

Comment nous chauffer entre-temps ?

Le fait est que notre patrimoine immobilier est en grande partie mal isolé. Francies Van Gijzeghem, directeur d’ABDE Solutions déplore : “Il faudra encore au moins cinquante ans avant que toutes les maisons soient correctement isolées. Et notre parc de poêles est désespérément obsolète. Les pouvoirs publics ne s’en sont pas préoccupé. Personnellement, j’ai tenté pendant des années de faire remplacer les anciens poêles par de nouveaux appareils automatiques. Mais je n’ai pas été pris au sérieux. Le potentiel est énorme, mais personne ne s’en soucie. Aucun ministre n’a jamais établi les normes relatives aux poêles comme il le devrait. Une vision coordonnée dans ce domaine est indispensable.”

Faut-il encore utiliser la biomasse dans nos maisons ?

“D’où aussi mon appel à l’interdiction des feux ouverts”, ajoute Michel De Paepe. “Le rendement est mauvais. Mais surtout la combustion du bois nuit à la santé : elle provoque l’émission de nombreuses particules fines et substances cancérigènes, comme les HAP et dioxines. Nous ne pouvons pas continuer à utiliser massivement des feux ouverts.  La situation deviendrait intenable pour la qualité de l’air. Utiliser la biomasse de manière contrôlée et intelligente est une autre chose. Mais je me pose alors la question : devons-nous continuer à utiliser la biomasse, qui selon moi n’est pas inépuisable, dans nos maisons ou plutôt dans une grande centrale à biomasse qui contribue à la stabilité de notre réseau d’électricité ?”

Le bois ne manque pas

Wim Vanlede de Stroomop se demande pourquoi la biomasse suscite autant de critiques. “La crainte d’une pénurie de bois n’est pas justifiée. Si vous investissez dans les forêts, vous pouvez en retirer énormément.” “On le voit en Allemagne”, précise Luc Vermeeren d’Ecopower. “Deux millions de tonnes de pelles y sont produits chaque année. Ils prélèvent pas mal de bois dans leurs forêts et pourtant leur réserve de bois affiche une augmentation de plus de dix pour-cent. C’est donc une question de politique et dans ce domaine, nous ne sommes pas très brillants.”

Selon Wim Vanlede, à l’avenir, nous utiliserons précisément moins de bois qu’aujourd’hui. “Nos maisons sont de plus en plus éco-énergétiques et nous brûlons la biomasse dans des appareils de plus en plus performants. Le gain est donc double.” Stefaan Paulus de CSB Waste Solutions ne craint pas non plus une pénurie. “Au contraire, nous sommes actuellement confrontés à un excédent de bois. Que l’on estime aujourd’hui à environ 500.000 tonnes. Il y a donc de la marge pour la biomasse dans le mix énergétique.”

Sous forte pression

Benjamin Clarysse, chargé de politique au Bond Beter Leefmilieu, s’attend à ce que la biomasse soit davantage encore mise sous pression. “La biomasse ne sert en effet pas uniquement comme combustible, mais aussi comme matériau de construction et matière première dans l’industrie. Pour avoir une économie totalement neutre sur le plan climatique nous avons besoin d’alternatives aux matières premières fossiles. Il s’agira pour une grande part de la biomasse. Aujourd’hui, il y a peut-être assez de bois, mais demain, l’utilisation de la biomasse sera mise énormément sous pression par les différents secteurs.”

La combustion domestique dans le viseur

“Très clairement, les pouvoirs publics négligent la qualité de l’air”, poursuit Benjamin. “Nous recevons pas mal de courriers de gens dont la maison est bien isolée et équipée d’un système de ventilation contrôlée. Cependant, ce système de ventilation aspire l’air pollué des voisins qui ont un mauvais système de chauffage. Fin octobre, la Flandre a approuvé un nouveau programme pour la qualité de l’air avec des mesures destinées à améliorer la qualité de l’air. La combustion domestique y est clairement dans le viseur. Celui qui souhaite encore se chauffer au bois ou aux pelles doit installer un très bon appareil. Mais selon le BBL, nous devons surtout dissuader les gens d’installer des appareils et les convaincre d’opter pour des technologies sans combustion. En Flandre, un Green Deal combustion du bois (une sorte de convention) a été conclu entre le secteur et les autorités flamandes. Mais celui-ci ne stimule pas l’isolation ni le remplacement par des pompes à chaleur ou réseaux de chaleur. C’est là une occasion manquée.”

Nécessité d’un entretien obligatoire

“Cette législation est très importante”, pense aussi Stefaan Paulus. “Il existe aujourd’hui des techniques capables de filtrer et récupérer les particules fines. Mais il faut surtout une législation qui impose un entretien obligatoire et prévoit un suivi adéquat.” Cela implique, observe Christophe Fonteyne, peut-être un coût, mais en revanche, cela représente jusqu’à neuf milliards d’économie sur les soins de santé. “Donc un cadre légal avec un contrôle obligatoire du conduit de fumée et du système de filtration, par exemple par un ramoneur agréé, est parfaitement possible. Ainsi, nous parviendrons à réduire de manière drastique les émissions de particules fines.”

“Les normes ne sont pas respectées”

“La Belgique fut pourtant le premier pays en 2011 à se doter d’une norme active pour les pelles”, rappelle Francies Van Gijzeghem. “Mais il s’agit aussi de respecter les normes de qualité et d’effectuer des contrôles.” Luc Vermeeren note une similitude avec l’isolation des habitations. “À ce niveau également, personne n’a trouvé un bon système de financement permettant aux personnes d’isoler leur maison convenablement, même si elles ne disposent pas de l’argent pour le faire. Ainsi, il faudrait pouvoir remplacer son poêle à bois de vingt ans par un nouveau modèle.”

“Il en va de la responsabilité des pouvoirs publics”

“On voit en effet que les pouvoirs publics flamands négligent aussi bien la qualité de l’air que l’aspect énergétique de nos habitations”, confirme Benjamin Clarysse. “Et ce sont autant de bâtiments qui sont construits au mépris de l’écologie. Les mesures ne viennent pas. En tant que particulier, vous ne pouvez que faire des choix parmi les propositions qui vous sont faites. Les pouvoirs publics doivent indiquer clairement la part de biomasse pouvant encore être utilisée au niveau des ménages et de quelle manière. Et ce n’est qu’à ce moment-là que le particulier sera capable de faire les bons choix. On constate que beaucoup de particuliers et d’entreprises font vraiment de leur mieux, mais si le cadre n’est pas correct, on ne parvient à rien.”

Quatre piliers

Wim Vanlede : “Ce qui est dommage c’est que cette discussion sur la biomasse est menée en l’absence des personnes concernées. Écoutons les garde-forestiers, visitons une usine de pelles et examinons le fonctionnement d’un poêle efficace. Dans ces conditions seulement, vous saurez ce qu'il en est. Actuellement, on lit dans la presse que le chauffage au bois doit être interdit, alors que la question n’est pas là. Il est important de prendre la bonne direction : avec des appareils efficaces, le bon combustible, des installateurs qualifiés et des utilisateurs bien informés. Quatre piliers capitaux, mais aujourd’hui, il n’y a que des pellets certifiés et des chaudières et poêles certifiés. Les autorités ne s’occupent pas du reste. Alors que nous sommes tous demandeurs. Ainsi, nous continuons à nous chauffer avec des vieux poêles, ce qui est mauvais pour tout le monde. De cette manière, vous créez une impasse et il n’y a aucune chance d’amélioration.”

“Les anciens poêles et chaudières doivent réellement disparaître”

“Une chaudière aux pelles représente naturellement un investissement de 15.000 € et 5.000 € pour un poêle”, note Ludwig Van Wonterghem. “Lorsque votre réfrigérateur ne fonctionne plus bien, vous en achetez un nouveau. Et vous en trouverez déjà un à 300 €. De plus, les gens ne savent pas qu’un poêle au bois de vingt à trente ans ne peut plus être utilisé. Ils sont étonnés de connaître le rendement de celui-ci. Alors qu’aujourd’hui, il existe des poêles avec un rendement de combustion de 90 pour-cent et des chaudières avec un rendement de 99 pour-cent. Aussi, les pouvoirs publics doivent favoriser l’acquisition d’une chaudière ou d’un poêle performant.”

Mix de pompes à chaleur, réseaux de chaleur et biomasse

Christophe Fonteyne : “Nous savons que la plus grosse part de notre mix énergétique actuel, à savoir les combustibles fossiles, doit être supprimée à très court terme. Il est impossible de remplacer ceux-ci par des installations électriques. Nous n’avons ni les entreprises ni le personnel pour y arriver. De plus, nos maisons ne sont pas suffisamment isolées. Qu’est-ce qui est possible alors ? Un mix de réseaux de chaleur, pompes à chaleur et biomasse. Mais sur un mode très efficace.”

Haro sur les appareils multi-combustibles

Et les appareils multi-combustibles doivent, selon Benjamin Clarysse, en être bannis. “Certaines personnes brûlent vraiment tout et n’importe quoi dans ce type d’appareil sans se soucier des conséquences pour la santé. Ce sont des choses qui ne doivent plus exister aujourd’hui. Un quick-win donc pour les autorités. Des mesures de contrôle et de suivi doivent permettre de mettre hors-jeu tous les appareils polluants. Les autorités doivent avertir des effets de l’incinération de détritus en tous genres sur la santé.” Un avis que partage Ludwig Van Wonterghem : “Les pellets sont un combustible normé qui est garanti sec et constitué de bois et dont la combustion est garantie inoffensive. Des garanties que nous n’avons pas chez les personnes qui vont acheter un appareil multi-combustibles.”

Mauvaise combustion

Luc Vermeeren déplore par ailleurs le lien rapide que les gens établissent entre l’odeur, la fumée et la combustion du bois. “Lorsque vous brûlez du bois correctement, une odeur se dégage uniquement au début. Ensuite, l’odeur disparaît. Une épaisse fumée qui sort de la cheminée et une forte odeur sont des signes d’une mauvaise combustion.”

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